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vendredi 31 juillet 2015

La rédaction de la note de synthèse : un peu d’attention et très peu de soucis (5)



Une fois que vous avez votre plan et les infos nécessaires, il ne vous reste plus qu'à rédiger. Et quand je dis "il ne reste plus", ça va quand même vous prendre deux bonnes heures. Pourquoi temps de temps? Parce que faire court, ça prend du temps, et vous avez besoin de faire court!

Suivre son plan de près !

J’ai l’impression de me répéter, mais si vous vous êtes emmerdés à prendre du temps pour établir un plan, ce n’est pas pour en changer au beau milieu de votre rédaction.

Donc, une fois que vous avez validé pour vous-même votre plan détaillé, avec les idées inscrites à l’intérieur, vous ne pouvez le modifier au cours de votre rédaction qu’à la marge. L’inverse vous ferait perdre un temps considérable, pour un gain minime au niveau de la qualité réelle de votre plan.

Suivre son plan ça veut dire aussi se limiter dans les parties à des développements qui correspondent au plan. Dans un commentaire d'arrêt on peut digresser, la longueur du rendu final n'est pas (jusqu'à un certain point) mesurée. Dans la note de synthèse, chaque ligne compte. Donc faites des phrases courtes, condensées, qui sont riches en informations et tout de suite appuyées par les documents.

Garder trace des documents utilisés

L’un des critères essentiels d’une bonne note de synthèse est d’utiliser l’intégral des documents soumis. Un oubli, et c’est foutu ! Bon, peut-être pas, mais c’est un point important. Pour être sûr de ne rien oublier, le meilleur moyen c’est d’adopter un système de vérification et de ne pas en changer jusqu’à l’épreuve. Voici celui que je vous propose :
  • Notez bien les numéros des documents dans le tableau que je vous ai indiqué dans mon précédent article sur l’analyse des documents
  • Au moment de l’établissement de votre plan détaillé, indiquer pour chaque idée développée le(s) document(s) qui les justifie(nt) ; lorsque vous incluez un document dans votre plan, entourez-le dans votre tableau d’analyse, ainsi vous pourrez repérer les documents que vous n’avez pas encore intégrer dans votre plan
  • Au moment de la rédaction, lorsque vous employez un document, cochez le à la fois dans votre plan détaillé (pour vérifier que vous n’avez pas oublié quelque chose dans une partie), et barrez le dans votre tableau (pour vérifier que vous avez au moins cité une fois chaque document)
  • Au moment de votre relecture, vérifiez bien que tous les documents sont cochés, sans recompter manuellement à l’intérieur de votre note
Si vous suivez bien ces étapes, vous gagnerez du temps et perdrez en stress au moment de votre relecture, car vous saurez que, par définition, vous n’avez pas pu oublier un document. Et vous verrez que le temps et le stress seront les deux points les plus difficiles à maîtriser pour la note de synthèse.

« L’art de la citation est l’art de ceux qui ne savent pas réfléchir par eux-mêmes »

Cette citation de Voltaire, qui me permet d’avoir l’air d’avoir beaucoup de culture alors que je n’ai qu’une connexion internet, est à contredire dans votre note de synthèse. Vous devrez montrer que vous êtes capables de réfléchir en citant des documents, de réfléchir en empruntant la réflexion des autres.

D’un point de vue purement matériel, comment citer ? Je vous donne des pistes que j’ai employées, mais les exigences de ce point de vue peuvent varier selon les IEJ :
  • De façon générale, faire référence à un document de la façon suivante : « la plupart des pays sont dotés d’un systèmes de TVA (Document 5) ». Pas d’utilisation des références techniques du document, simplement son numéro.
  • Il est possible également de préciser un petit peu plus avant le contenu du document, lorsque cela se justifie : « Une commission de l’assemblée nationale estime par exemple qu’une hausse de deux points de la TVA entraîne une hausse de 3 points des prix (Document 8) ».
  • Je déconseille les citations in extenso de morceaux des documents : ça va rallonger votre note, et l’espace est une denrée rare. De plus, si vous ne synthétisez pas les informations du document, et vous vous contentez de mettre côte à côte des infos, vous passez à coté de l'exercice.
  • Toutefois, je pense qu'il n'est pas trop risqué de citer un mot ou une très courte expression, si vous voulez insister (et que c'est pertinent) sur un détail d'un document en particulier : « La commission considère la prévision "totalement irréaliste" (Document 8) ».
Essayez au maximum de garder la citation des documents le plus proche possible de l'information ou de l'idée que vous avancez, pour faciliter la tâche de votre correcteur.


Voilà à peu près tout ce qu'il y a à savoir sur la rédaction de la note de synthèse; pas grand chose en fait. C'est une matière qui est très facile à expliquer et raconter, mais c'est à force de pratiquer que vous deviendrez bons, et il faudra être bon le jour de l'examen. Donc hop, à l'entrainement !

Alexandre



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jeudi 30 juillet 2015

Une bonne note de synthèse se construit brique par brique (4)




A la différence de l’article similaire que je vous avais proposé concernant la note de synthèse, il ne me semble pas possible de vous fournir des plans types pour la note de synthèse. Tout simplement parce que la typologie des sujets est beaucoup plus aléatoire, et qu’il est difficile de dégager un plan modèle qu’on pourrait calquer sur tous les devoirs.

Cependant, pour ceux qui sont actuellement dans des prépas d’été pour le barreau, des amis m’ont dit que des plans types étaient proposés. Je n’y ai pas accès, bien entendu, donc je ne les commenterai ni ne les reproduirai pas ici ; je suis néanmoins assez curieux de ce qui est proposé. Ces gens-là sont des professionnels, donc s’ils vous en proposent, c’est que ça doit marcher plutôt bien.

Personnellement, je vais me contenter de vous fournir un modèle de réflexion et de méthode pour bâtir votre plan de note de synthèse. Il s’agit d’une méthode « de bas en haut », c’est-à-dire qui part des idées principales, pour remonter vers un plan ; à l’inverse de ce que je vous ai proposé pour le commentaire, qui part d’un plan type, et que l’on garnit au fur et à mesure.

Partir des documents pour construire des idées

Si vous avez bien suivi ma méthode pour examiner vos documents, vous avez maintenant un tableau qui recense l’intégralité des documents ainsi que les idées principales évoquées dans chacun des documents.

Vous allez pouvoir commencer à les réunir et les rapprocher par les mots-clefs que vous avez notés, en comparant leur contenu en vous basant sur la colonne « idées principales ». Les rapprocher ça ne veut pas dire que chaque document ne se coordonne bien qu’avec un seul autre document, dans l’immense majorité des cas d’ailleurs certains documents très denses se retrouveront dans plusieurs idées et plusieurs thématiques.

Votre objectif ici est de parvenir rapidement à des groupes de 3 ou 4 documents (plus ou moins), qui portent sur la même idée. Pour les matérialiser, vous êtes libres : des petits signes, un code couleur avec vos stylos fluo, une numérotation, du moment que vous vous y retrouvez.

Partir des idées pour construire des thématiques

Une fois que ce premier travail de regroupement a été fait, vous allez pouvoir grouper les idées par thématiques. Que ce soit des idées opposées, complémentaires ou parallèles, vous allez pouvoir les combiner pour former les thématiques. Il faut faire attention à bien voir comment les différentes idées s’articulent directement ensemble, car vous ne pourrez pas faire le lien entre les documents avec vos connaissances personnelles, qui sont à proscrire.

L’important est de commencer à obtenir un chemin général de réflexion autour des documents sur lesquels vous avez travaillé ; ce chemin va être une bonne base pour construire un plan cohérent. Le tableau vous fournira ici encore un appui important, car vous n’aurez pas la tentation d’aller relire les documents pour voir comment les arranger : si dans votre tableau une idée n’apparait pas clairement, c’est qu’elle est trop tirée par les cheveux, ou en tout cas pas assez clair, pour servir de base. Dans la plupart des cas, c’est une idée personnelle que vous essayez (vainement) d’habiller avec des documents pour pouvoir la caser, ce qui est une erreur.

Partir des thématiques pour construire des parties

Normalement, si vous avez fait les premières étapes correctement, la formation de vos parties devrait venir assez naturellement. A partir des grandes thématiques, il faut trouver une manière, à la fois harmonieuse et logique, de les agencer pour couvrir et enchainer naturellement les idées que vous avez mises dans ces thématiques. Il faut également que vos parties se répondent, que le correcteur n’ait pas l’impression que vous ayez balancé 4 morceaux au hasard.

Bien sûr, une fois que vous avez tiré votre plan suivant cette méthode, jetez-y un œil critique pour voir si dans l’ensemble ça tient la route aussi ! Quelques bons signes sont : les titres s’enchainent de façon logique, vos parties ne sont pas interchangeables entre elles, il semble assez facile savoir où se trouve une info en regardant le plan uniquement.

Voilà donc ma proposition de méthode, ça reste assez vague j’en conviens, mais la note de synthèse est plus difficile à modéliser que les autres épreuves de droit. L’important est de comprendre la philosophie de cette méthode : bâtir peu à peu en partant des documents, et en les regroupant. Cela permettra de conserver une cohérence et un enchainement fluide de vos parties. Je ne pense pas qu’il soit possible ni souhaitable d’établir ex nihilo un plan en se basant uniquement sur sa première impression des documents, et de le remplir ensuite à tout prix. Je dois vous parler toutefois d’une hypothèse un peu différente, mais qui peut arriver, le cas où la note de synthèse proposée appelle un traitement chronologique.

La question particulière de la note chronologique


Il peut arriver, c’était le cas lorsque j’ai passé les examens moi-même, que la note de synthèse proposée vous invite à la traiter de manière chronologique. En général, ça peut se voir très vite à la lecture des documents : les documents sont dans l’ordre des dates, un ou deux documents correspondent à des éléments marquants, autour desquels sont organisés les autres documents, le titre du sujet contient les mots « évolution », « changement », etc.

Attention quand même : toute collection de documents sur un sujet particulier aura toujours une petite dimension chronologique. Cela ne justifie pas pour autant systématiquement un traitement chronologique ; faites attention à voir si la dimension temporelle et l’évolution des thématiques et des points de vue au cours des documents est réellement un point pertinent de l’analyse qui est demandée.

Dans le cas d’un plan chronologique, la vraie recommandation que je peux vous faire est de situer votre ou vos documents « charnières » à la jonction de vos parties et sous-parties, ça va vous permettre de rester très clair dans l’exposition et le découpage de vos idées.

Exemple personnel : ma note de synthèse portait sur le droit à l’oubli, et la condamnation de Google sur le sujet au cours de l’année 2014. Il y avait 2/3 de documents antérieurs à la décision, la décision contre Google, puis 1/3 de documents faisant suite à la décision. J’ai évoqué la décision au début de mon II.A), en réservant la première partie au contexte qui a amené la décision et aux diverses positions qui étaient exprimées dans les documents, et la seconde partie aux réactions et conséquences de la décision. J’ai cité les documents principalement dans leur ordre chronologique au fil de ma note, mais pas systématiquement, des idées exprimées avant la décision pouvant être mises en relation avec les conséquences réelles postérieures.

A contrario, dans l’un des entrainements réalisés, dont le thème était les droits des animaux, je n’ai pas utilisé de plan chronologique, quand bien même l’un des documents était une réforme du Code rural. En effet, à la différence de mon premier exemple, la réforme en question n’était pas reprise de façon importante dans le reste des documents, et ne constituait pas une information « charnière » ; le plan chronologique ne me paraissait donc pas adapté.
 
 
Voilà donc pour la création d'un plan, il ne reste plus qu'à écrire la note en elle-même. Mais contrairement à ce que je vous ai dit pour le commentaire, la rédaction de la note de synthèse est assez simple, plus qu'il suffit de reformuler et agencer les idées des documents, de façon claire et directe. Je vous parlerai donc simplement des quelques règles à respecter pour ne pas faire de grosse erreur, ainsi que de l'importance de suivre la progression de sa rédaction par rapport aux documents.
 
Alexandre

 
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mercredi 29 juillet 2015

Avant la synthèse, l’extraction des informations (3)



Dans cet article, je vais vous proposer une méthode pour appréhender les documents qui vous seront donnés pour réaliser votre note de synthèse, méthode forcément partiale et perfectible, puisque c’est la mienne.

Elle consiste en plusieurs étapes distinctes, avec pour objectif final d’avoir au bout de deux heures d’épreuves, un brouillon unique sur lequel vous avez toutes les informations extraites des documents, ainsi que les références des documents, et également les quelques thématiques et idées fortes de l’ensemble.

Une première lecture d’ensemble, la fleur au fusil et le fluo aux doigts

Vous avez devant vous une pile de documents (j’exagère un peu, un petit dossier de documents), et il vous faut en faire le tour le plus vite possible.
Comme je vous l’ai dit dans l’article précédent, je vous conseille de commencer par prendre 45 minutes (ou ¾ d’heures, selon votre préférence) pour lire l’intégralité des documents une première fois, votre surligneur fluo à la main.
Que surligner ? Uniquement ce qui est important, sinon ça n’a aucun intérêt. Vous jugerez de ce qui est important en vous basant sur le titre de la note de synthèse et l’ensemble des documents proposés. Bien sûr, vous avez beaucoup plus de chances de ne pas avoir une vision claire du sujet sur les premiers documents. Ce n’est pas grave, il faut bien commencer par un bout, mais tenez en compte dans vos lectures : vous verrez mieux ce qui est important dans les documents une fois que vous aurez déjà passé une grosse demi-heure le nez dedans.
Vous cherchez dans cette première lecture à « épurer » les documents, faire ressortir uniquement les éléments pertinents et virer tout le texte inutile autour, de façon à aller le plus vite possible au cours de la deuxième lecture. Vous devez aussi vous imprégner du ton, des concepts, des idées développées au cours des documents.

Une seconde lecture avec grille


Une fois que vous avez fait ce premier travail de lecture, vous avez déjà une bonne idée du sujet de la note, non seulement du thème, mais également des bornes du sujet (thématiques, et chronologiques, voire parfois géographiques).

Mais ce n’est pas suffisant, il est impossible qu’après une seule lecture vous ayez appréhendé l’intégralité des documents et des idées. Il vous faut donc repartir au début de vos documents et relire. Mais cette fois-ci laissez tomber votre Stabilo, et prenez une feuille de brouillon. Sur cette feuille, prise au format paysage (c’est-à-dire plus large que haute), tracer un tableau à 5 colonnes : numéro du document, références, type de document, idée(s) principale(s), mots-clefs. Maintenant, il ne vous reste qu’à relire vos documents en remplissant les colonnes comme ça :

Numéro du document : ça parait bête, mais c’est extrêmement important. C’est cette colonne qui vous servira à vérifier que vous avez bien utilisé tous les documents  dans votre, condition sine qua non à l’obtention d’une bonne note.

Références : la source et la date du document. La source pour savoir ce qu’est le document, un article de journal, ou de doctrine, ou un arrêt, ou un site internet (les sources de la note de synthèse peuvent être très variées).

Type d’informations : important également, pour garder un certain recul sur les documents et pouvoir les combiner efficacement. Je pense que l’on peut se limiter à 3 types d’informations : faits rapportés, opinion ou données « brutes » (textes juridiques, données chiffrées, etc.). Ainsi, ça vous évitera, au moment de la rédaction, de prendre pour vérité absolue ce qui n’était en fait que l’opinion d’un journaliste, ou à l’inverse de ne pas souligner assez des données chiffrées qui vous sont données.

Idées principales : noter ici les 2 ou 3 idées ou informations majeures à retirer du document. Il n’y en aura pas plus que cela en général, visez vraiment les éléments les plus pertinents. C’est la colonne la plus importante, puisque c’est sur cette colonne que vous allez bâtir vos parties et vos paragraphes. Il est inutile de rédiger des phrases complètes à chaque fois, mais soyez très clair dans ce que vous notez.

Mots-clefs : là, on est déjà plus forcément dans l’extraction des informations, mais déjà dans la classification et le regroupement. Vous indiquez des mots clefs, pas plus de 5 max, qui correspondent au contenu du document. Ça vous permettra de regrouper très facilement ensemble les documents qui parlent de la même chose, et de pouvoir construire des paragraphes et des parties autour de ces mots-clefs.

Un exemple court, vaguement tiré du sujet qui avait été posé lorsque j’avais passé moi-même la note de synthèse :

Numéro du document
Références
Type d’informations
Idées principales
Mots-clefs
5
CJUE 13/05/2014
Faits & données juridiques
Les moteurs de recherches doivent éliminer, sur demande, le référencement des articles non pertinents.
Google, condamnation, droit à l’oubli
6
Le Monde 22/05/2014
Faits
Google condamné pour « non-respect du droit à l’oubli » par CEDH. Dirigeant a annoncé des changements de politique de référencement des articles portant sur des personnes, en lien avec les gouvernements.
Google, condamnation, droit à l’oubli, coopération
7
Communiqué commission européenne 01/06/2014
Opinion
La commission approuve la décision ; annonce une volonté d’encadrer le droit à l’oubli au plus près, pour qu’il soit facilement exercé.
Droit à l’oubli, volonté politique, protection des personnes

La note de synthèse portait sur le droit à l’oubli de façon générale, organisé autour d’une décision de la CEDH à propos du droit à l’oubli, et du référencement d’articles par Google. Je sais donc, grâce à ce tableau, que Google a été condamné et que ses dirigeants sont prêt à se conformer à la décision de bonne volonté (de façon certaine, puisque c’est un fait), et que je peux utiliser cet article dans un paragraphe dédié, soit à la décision de condamnation elle-même, soit à la valeur du droit à l’oubli, soit à la coopération entre acteurs privés et publics pour la protection des personnes.
Une fois tous vos documents recensés comme ça, vous avez une bonne base de travail : les informations importantes de chacun des documents, et une bonne vision générale de la thématique  et du sujet en jeu.

Mais alors, pourquoi ne pas commencer par le tableau ?

C’est vrai que si ce tableau est si efficace que ça pour rassembler et analyser les informations, pourquoi ne pas commencer directement par le remplir, dès la découverte des documents ?

Tout simplement parce que pour extraire efficacement les informations importantes, il faut avoir déjà une bonne idée de leur contenu, et du contenu des autres documents. Les informations importantes se révèlent par rapport au sujet global de la note de synthèse, et par la combinaison avec les autres documents.

Ce qui veut dire aussi qu’il est tout à fait possible d’utiliser le même document plusieurs fois dans différentes parties, parce qu’en combinaison avec d’autres documents, il n’aura pas le même sens à chaque fois.

Vous pouvez maintenant jeter les documents

Ne les balancez pas non plus directement sur le collègue d’à côté, on pourrait jaser. Mais je vous conseille de les mettre de côté pour la suite de l’épreuve. Vous n’avez matériellement pas le temps de les reprendre pendant que vous concevrez votre note, peut-être un peu pour vérifier des détails pendant la rédaction, et encore. Donc il ne sert à rien de les garder sous les yeux, vous seriez tenté de mettre le nez dedans ; faites-vous confiance ! Vous avez pris le temps qu’il fallait pour lire et analyser les documents ; maintenant c’est l’heure de mettre en forme et de rédiger, rien d’autre.

Je sais que cette méthode peut avoir l’air un peu brutal, mais vous devez bien comprendre qu’on vous demande de passer de 40 pages à 4 pages d’informations. Il n’est pas possible de le faire sans enlever, progressivement et couche par couche, de la matière jusqu’à avoir la substance concentrée des documents.

Et une fois que vous avez cette substance, il faut maintenant la réarranger dans un plan cohérent, ce que nous verrons dans un prochain article !

Alexandre
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lundi 27 juillet 2015

Le long sprint de la note de synthèse (2)

 
Pour rappel, la note de synthèse est une épreuve qui dure 5 heures, ce qui peut paraître énorme. Mais c’est une épreuve qui est également très longue à réaliser, donc 5 heures, c’est long et court (c’est lourd, c’est lent ?).

5 heures, mais pour faire quoi ?

La note de synthèse va vous demander de résumer en 4 pages manuscrites une quarantaine (plus ou moins) de pages de documents. D’un point de vue purement mathématique :
  • Une personne moyenne lit entre 250 et 300 mots par minute. Ce qui correspond à un peu moins d’une page de document par minutes, à peu près (cela dépend de la police d’écriture et des marges). Ce qui veut dire que pour lire les documents, sans aller plus loin que la lecture simple, il faut au moins 40 à 45 minutes, incompressibles.
  • Et à l’écrit il faut compter une vingtaine de mots par minute ; par page d’écriture manuscrite, il faut compter à peu près 300 mots, donc 60 minutes de rédaction. Ce chiffre est valable pour de la recopie pure et simple, et là il faudra réfléchir avant d'écrire.
Ce qui veut dire que d’un point de vue timing, vous avez déjà près de 2 heures de l’épreuve qui est mobilisé pour des étapes purement fonctionnelles, sans réflexion ! Vous n’avez donc en réalité que 3 heures pour :
  • Extraire les informations des documents
  • Les regrouper par thématiques
  • Organiser ces thématiques en 4 parties
  • Organiser ces parties dans un plan
En vérité, lors de la note de synthèse, vous n’allez pas les sentir passer ces 5 heures, grâce au mélange du stress et de la concentration. Personnellement, je suis un gros fumeur, et pendant les épreuves de note de synthèse, même à l’entrainement, je ne ressentais absolument pas le besoin de fumer ; ni d’ailleurs de boire, manger ou rejoindre les toilettes un instant. Je sais que ce n’est pas le cas de tout le monde, mais globalement vous allez être dans le même état d’esprit, surtout si vous êtes sensibles au stress.

Se donner une méthode pour se fixer des temps de passage

La note de synthèse se prépare longtemps à l’avance, non pas en révision, mais en création d’une méthode que vous suivrez à chaque fois que vous passerez ce type d’examens. Cette méthode aura une partie de fonds (identification des documents, extraction des informations pertinentes, organisation du plan, que nous verrons plus tard), mais aussi une partie timing.
Je vous soumets mon idée d’un bon timing :
  • 2h de lecture et traitement des documents
    • 45 minutes de première lecture avec surlignage
    • 1h15 de relecture avec prise de notes sur les document
  • 30 minutes de création d’un plan + titres
  • 2h de rédaction
    • 15 minutes pour l’introduction
    • 20 minutes par partie (80 minutes totales)
    • 5 minutes de relecture
Honnêtement, si vous voulez gagner du temps, je vous déconseille de reprendre du temps sur les deux premières parties. Vous pourrez toujours écrire plus vite ; c’est beaucoup plus difficile de se forcer à réfléchir plus vite !

L’entrainement pour internaliser le timing

La note de synthèse est l’incarnation de l’épreuve pratique par excellence, car aucune connaissance n’est requise pour la réaliser. A la limite, il faut connaitre certains éléments juridiques dans le cas où des jurisprudences ou des articles de doctrine font parties des documents inclus, mais ce sont des connaissances que vous aurez acquis entre la L1 et la L2, donc vous n’aurez pas à les réviser.
 
L’avantage est que cela permet de voir clairement quel type d’entrainement est nécessaire : de la pratique, de la pratique, de la pratique. C’est le seul moyen de vous donner des repères dans la réalisation de votre méthode, et éventuellement de la modifier. Ça vous permettra également de ressentir le passage du temps, à force d’en faire, vous verrez que vous saurez instinctivement à 10 minutes près où vous en êtes dans votre note de synthèse.
 
Et ça vous permettra aussi de vous habituer à réaliser les mêmes choses encore et encore : à force d’écrire des pavés de 4 pages, vous allez bien finir par aller de plus en plus vite, et être de plus en plus efficace. Même chose pour la lecture des documents.
 
Ce qui veut dire quelque chose d'important pour votre préparation : le seul entrainement valable pour une note de synthèse, c'est un exercice complet (de la découverte des documents à la rédaction finale), et chronométré.
 
On peut réviser les autres épreuves de façon "fractionnée" : réviser le fonds du droit, se faire des plans de commentaire-types, s’entraîner à repérer les questions de droit dans les cas pratiques. Mais la note de synthèse ne présent une difficulté en tant qu'épreuves que du fait de son format pris dans son ensemble.
 
Donc pas de triche, un entrainement note de synthèse, c'est 5h à votre bureau.

Ces 5 petites choses qui vous feront terminer en retard (ou ne pas terminer du tout) le jour de l’épreuve

Il y a plein de raisons pour lesquelles vous pourriez prendre du retard dans la réalisation de votre note de synthèse, toutes très variées. Mais je pense pouvoir en signaler 5 qui sont assez récurrentes, et assez fatales.
 
Ces éléments vous seront aussi très utiles au moment de vos entraînements, si jamais vous n’arrivez pas à terminer dans les temps : regardez la liste, et essayez de voir si vous pouvez retrouver ce qui vous a mis en retard.

La noyade dans les documents

Symptôme affreux de la bataille contre l’impression de vide causée par le trop plein d’informations. Vous avez commencé à lire les documents, et le sujet ne vous parle pas, alors vous tournez en rond, vous avancez, vous revenez, vous cherchez à comprendre, mais vous n’y arrivez pas. Bref, vous arrivez à la fin des documents et il y a déjà 2h30 de passées ; c’est la catastrophe.
 
Pour ça, je n'ai pas de recettes miracles, à part l'entrainement et la hauteur. L'entrainement, pour ne pas être submergé par la quantité d'informations que vous allez trouver dans le dossier de documents que l'on va vous fournir.

La recherche de LA vérité

Là ce n’est pas vraiment la question de se perdre dans les documents, mais de chercher, au moment de la mise en forme de vos thématiques et de votre plan, à concilier à tout prix les documents que l’on vous a soumis, les idées et les opinions que vous en avez dégagé.
 
Il y a des cas de note de synthèse où des opinions très fortes seront opposées : j’avais eu en entrainement par exemple quelque chose sur le statut et la protection des animaux, qui présentaient des documents d’opinions très marquées, de trois ordres : des pros droits des animaux, des « antis » (principalement des éleveurs, qui ne sont pas contre mais qui avaient peur de l’impact sur leur métier), et des opinions scientifiques sur le stress animal. Il était rigoureusement impossible de concilier ces points de vues, qui n’utilisaient pas les mêmes concepts, les mêmes idées et qui étaient par définition opposés. Mais ce n’était pas le but ! Au contraire même.
 
Vous devez être capable de faire émerger de votre note un état des lieux d’une situation ou d’une thématique ; ce qui s’oppose à une vérité absolue. Cela peut donc nécessiter de concilier, dans une même partie, des points vue différents, sans chercher à les juger les uns par rapport aux autres, ou à mettre un au-dessus de l’autre.
 
Le risque c’est de se perdre dans les infos qui vous sont données, et de ne pas prendre du recul par rapport au contenu de chacun des documents ; et donc de perdre du temps dans des analyses qui de toute façon ne vous serviront pas au moment de la rédaction.

Le meilleur plan

Le mieux est l’ennemi du bien, et il faudra avoir ça en tête absolument au moment où vous chercherez à établir un plan pour votre note, et aussi lorsque vous rédigerez. Vous pourriez avoir envie, absolument, de sortir le meilleur plan, la meilleure construction du monde. C’est possible, mais n’y consacrez pas plus de temps que ce que vous vous étiez fixés à l’origine, pour deux raisons.
D’abord, si vous avez bien fixé votre méthode et votre timing, et que vous ne le respectez pas, il n’y a pas de raisons que vous finissiez à l’heure, à moins de bâcler la rédaction de la suite. Du coup, vous allez appauvrir vos développements au profit d’un plan un peu meilleur, ce qui n’est pas forcément un gain. Cela dit, ça peut se concevoir si vous avez vraiment besoin de quelques minutes (pas plus de 5/10) en plus.
 
Le vrai risque, qui se posera au moment où vous rédigerez, c’est de changer d’avis à mi-chemin. De trouver, d’un coup, que votre plan est pourri, ou qu’il pourrait être meilleur, et de décider de repartir du début avec un nouveau plan.
 
Ne faites JAMAIS ça. JAMAIS. Pas parce que vous aurez trouvé le meilleur plan possible dès le début, en fait il est tout à fait possible que le plan auquel vous penserez pendant la rédaction soit meilleur que le premier que vous avez établi.
 
MAIS, vous n’aurez pas le temps de finir votre deuxième jet. 5 heures c’est déjà très court pour un devoir, alors en réaliser 1 et demi, c’est impossible. Et il vaut mieux rendre une note moyenne, voire médiocre, complète, plutôt que la moitié d’une note de meilleure qualité.

Le retour aux documents

Un autre risque au moment de votre rédaction, c’est d’aller replonger le nez dans les documents, alors que vous avez déjà fait votre plan, et réparti dans vos parties les documents et les idées. Vous allez me dire que c'est normal de vérifier les documents au moment de la rédaction, puisque c'est là-dessus que vous allez baser votre note. Je vous conseille une approche différente.
 
Une approche, comme je la raconterai plus en détail dans un prochain article, où vous dissociez totalement la lecture et l'analyse des documents, de la rédaction. Le but est qu'au moment de la rédaction, vous ayez déjà mis vos documents de côté, et que vous ne les consultiez plus du tout au cours de la rédaction.
 
L'avantage de cette méthode est de ne pas perdre du temps à revoir des documents dans le stress, alors que vous les avez déjà (bien) analysés; et ça permet également de rester concentré sur son plan et le développement de ses idées, plutôt que d'aller re-piocher des choses supplémentaires, au risque d'ailleurs d'oublier un document ou de vous répéter.

L’envol littéraire

Encore une fois, quelque chose qui vous guette au moment de rédiger (en même temps, il y a peu de risques directs au moment de la lecture des documents, puisqu’à priori, vous ne touchez rien à ce moment-là.
 
C’est donc au moment de la rédaction, que vous perdez de vue le but et l’objet de la note de synthèse : un document clair et concis, qui permet de réunir des informations en vue d’un travail futur. Pris d’une crampe du lyrisme, vous mettez des phrases à rallonge, faites des nuances alambiquées, reformulez à volonté, etc.
 
Deux problèmes : ça va rallonger votre texte, et ça va vous prendre énormément de temps. Ah, oui, un troisième problème est que le correcteur sera incapable de retrouver facilement les idées tirées des documents. Donc en gros rien n'ira.
 
Ici, encore plus qu'ailleurs, gardez un style simple, avec des phrases simples qui mettent en évidence les données et informations des documents

 
Voici pour la méthode générale de la note de synthèse, ça devrait déjà vous donner de bonnes idées de ce qu'il faut faire ou ne pas faire ! Au prochain article, on attaque du lourd puisqu'on parlera méthode d'extraction des idées à partir des documents.

Alexandre
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samedi 25 juillet 2015

Le commentaire de A à Z : abécédaire récapitulatif (5)

 
Notez bien comme le titre de cet article est l'archétype du titre bateau que vous ne devriez pas utiliser!
 
Dans cet article, je vous jette pêle-mêle (mais trié dans l'ordre quand même) quelques idées, mise en garde et précisions qui pourront vous aider, pour finir cette série d'articles sur le commentaire d'arrêt !
 
Abréviations : Très utiles, parce qu’elles permettent d’alléger vos phrases, il ne faut pas en abuser, et se limiter aux plus connues et aux abréviations légales. Surtout, il faut les introduire lors de la première utilisation, par exemple « Dans les sociétés à responsabilité limitée (SARL) », ensuite vous pourrez utiliser SARL à volonté. Ne créez pas les vôtres, même si vous les introduisez au début, le correcteur n’a pas envie d’apprendre vos raccourcis pour le peu de temps qu’il va passer à vous corriger (par exemple pas de SADCS pour « Société anonyme à directoire et conseil de surveillance », car personne n'utilise ça).

 
Brouillon : J’ai toujours admiré les gens qui avaient le courage de rédiger l’intégralité de leur commentaire au brouillon, pour le réécrire ensuite. Si vous avez l’habitude de le faire, et que vous écrivez vite, faites-le, pour ne pas changer vos habitudes. Mais si vous ne l’avez jamais fait, ne vous lancez pas là-dedans, vous ne finirez jamais à temps.
Au minimum, vous devez faire votre plan au brouillon avec les titres ; l’introduction peut être rédigée au brouillon également si vous avez peur de démarrer de travers et que vous ne voulez pas faire de grosses ratures moches sur votre feuille. Plus, ça devient difficile à gérer au niveau du temps.

Code : Vous en aurez un ou deux le jour de l’épreuve, et ils sont à manier avec précautions pour un commentaire. Ne vous y jetez pas dès le début de l’épreuve, vous faites un commentaire d’arrêt, donc commencez par lire l’arrêt. Ensuite, regardez dans votre Code si l’arrêt que vous allez commenter est cité sous les articles correspondants, ça vous donnera une bonne indication de sa valeur. Enfin, vous pouvez aller y piocher quelques éléments pour préciser vos connaissances, des jurisprudences parallèles ou divergentes, mais par pitié, n’allez pas y piocher des idées pour votre commentaire ou des jurisprudences au hasard (voir Jurisprudence).

Développements : Les arguments que vous apportez à l’appui de vos idées principales. C’est là qu’il faut faire court et efficace, pour expliquer clairement ce que vous voulez dire. C’est aussi là que doivent s’exprimer vos connaissances et votre analyse.

Exemples : Il est toujours assez compliqué de donner des exemples dans un commentaire d’arrêt, parce que cela donne très vite l’impression de s’éloigner de l’arrêt lui-même. Je pense qu’ils sont plutôt à réserver pour les dernières parties de votre commentaire, qui sont normalement plus ouvertes, et de les utiliser pour illustrer certains risques ou opportunités liés au changement de droit présenté dans l’arrêt. Si vous souhaitez en prendre, prenez les courts, simples et parlants ; il ne faut pas qu’ils vous prennent plus de 2 lignes à expliquer, grand maximum.

Fiche d’arrêt : Probablement la partie la moins intéressante du commentaire, parce qu’elle doit être un résumé factuel de éléments de l’arrêt (voir l’article dédié pour le détail). Prenez le temps de bien la faire, et dans la mesure du possible, commencez par y penser avant même votre plan, vous aurez ainsi bien en tête le contenu de l’arrêt et son contexte judiciaire, ce qui vous mettra à l’abri du hors-sujet. Au moins un peu.

Garder le fil : Certes, il est très important d’avoir un bon plan avant de commencer à rédiger votre commentaire. Mais il est encore plus important de le suivre lors de la rédaction ! Vous pouvez avoir l’impression au moment de la rédaction que vous avez fait des erreurs d’analyse, ou que vous pourriez optimiser votre commentaire. A moins de vous rendre compte que vous avez fait une grosse, grosse erreur, ne changez rien. Tout simplement parce que cela vous prendra pas mal de temps, au risque de ne pas finir, et parce qu’il n’y a globalement pas de raison que vous ayez de meilleures idées en plein milieu de votre rédaction que pendant le temps que vous avez consacré à l’analyse. Donc une fois que vous attaquez la rédaction pure sur la base de votre brouillon et de votre plan, tenez-y-vous.

Hauteur : Il vous en faut au moment de la rédaction du commentaire. Ne vous laissez pas prendre dans le contenu direct de l’arrêt, commenter c’est analyser et compléter par rapport à l’ensemble du droit qui entoure l’arrêt, il ne faut donc pas prendre tout ce qui est écrit dedans pour argent comptant. Cela sera notamment important au moment où vous porterez un œil critique sur l’arrêt, avant de le dénoncer comme le pire arrêt du monde, très dangereux ou immoral (ou l’inverse d’ailleurs), prenez un peu de recul pour nuancer votre appréciation, au risque d’avoir l’air totalement incapable de contextualiser aux yeux de votre correcteur.

Insécurité juridique : Notion inutilement vague et vaguement inutile qui sert de béquille bancale à de nombreux étudiants en panne d’idée lorsqu’il faut critiquer un peu un arrêt. Je m’explique : l’insécurité juridique peut éventuellement exister, mais elle depuis pas mal de temps reprise à toutes les sauces à la moindre variation du droit. De façon générale, un changement de droit n’entraine de l’insécurité juridique que pour ceux qui ne l’ont pas compris ou ont peur de se faire une opinion. Je ne vous interdis pas d’utiliser l’expression, mais si c’est pour vous borner à dire « Y a de l’insécurité juridique, la règle a changé alors qu’on était pas prêt, du coup on est tout perdu ! », je vous le déconseille (voir aussi Vide juridique).

Jurisprudence : Vous devrez en mettre dans votre commentaire, c’est absolument nécessaire puisque selon les domaines du droit, la jurisprudence peut avoir un rôle majeur dans la définition des règles de droit. Attention à quelques petites choses : citez le plus possible des arrêts que vous maîtrisez, ça vous évitera de dire des conneries, et ça vous permettra de mettre deux trois mots à propos de la décision au lieu de simplement le balancer entre parenthèses.
Surtout, surtout, n’allez pas piocher au hasard une JP dans un code, en ajoutant les références telles quelles (notamment la note d’une revue juridique, que bien sûr vous n’avez pas lu) ; l’effet sur le correcteur est terrible, puisque cela ressemble très fortement à une tentative d’escroquerie.


Longueur : Ce n’est pas la taille de votre commentaire qui compte. Globalement, il faut compter entre 6 et 10 pages (voir 12, si vous avez beaucoup d’idées), ça me semble à peu près correct. En dessous de 6, ça parait compliqué (1 page d’intro, 1 page par partie, 1 page cumulée de titres et transitions). Au-dessus d’une douzaine, ce sera en général un peu fouillis, et probablement avec des développements assez faibles : restez condensé pour rester pertinent de bout en bout.

Mise en forme : Je me rappelle d’une camarade qui passait l’examen d’entrée au CRFPA en même temps que moi, et qui se trouvait à la table devant la mienne. Au début de l’épreuve elle a demandé à sa copine qui était à côté « Tu sais si on a le droit de souligner les titres en rose ? ». Bon, dans ce cas précis, c’était peut-être un peu exagéré comme idée. Mais la mise en forme de votre commentaire, notamment les titres, est importante pour mettre en valeur votre texte. Pensez à sauter une ligne entre chaque paragraphe, et entre les titres et les paragraphes. Soulignez les titres pour les distingues, plutôt dans la même couleur que le reste du texte, ce n’est pas une œuvre d’art non plus.

Nous : L’une des solutions possibles pour écrire votre commentaire est d’utiliser le « nous » : « nous verrons », « nous pensons », « nous voyons donc »… Mais ce n’est pas très léger comme présentation. Les autres options sont le « on », mais ce n’est pas vraiment mieux, c’est un peu familier comme construction pour un commentaire ; le « il », avec parfois des tournures de phrases passives, type « il sera vu », « il est donc possible », « il faut noter », qui reste pour moi la solution la plus facile à mettre en œuvre et la moins casse-gueule. Le « je » est à proscrire, de même que s’adresser au correcteur avec un « vous ».

Originalité : Avantage et piège. Il faut essayer d’être original dans votre commentaire, mais pas à tout prix. Ne développez pas des thèses totalement irréalistes ou sans fondement, ou des interprétations ultra-minoritaires qui ne sont soutenues par rien. Par contre, je vous encourage à proposer des interprétations plus originales que celles qui sont communément reprises dans les cours, si vous pouvez les étayer avec des éléments de réflexion, de doctrine, voire de jurisprudence si vous en avez. Essayez de le faire uniquement sur des éléments que vous maîtrisez bien, mais surtout n’hésitez pas à le faire si le sujet donné correspond à des choses que vous connaissez très bien et sur lesquelles vous avez une opinion argumentée.

Plan : Je vous renvoie à l’article correspondant pour en faire un bon. N’oubliez pas son importance cruciale, c’est comme la devanture d’un resto, si ça ne vous plaît pas, même si c’est la meilleure bouffe du monde à l’intérieur, vous n’entrerez pas. Et les correcteurs ont énormément de copies à corriger, ils ne vont pas faire plus d’efforts que ça à chaque copie simplement parce que peut-être que le contenu vaut plus que ce que le plan et les titres laissent penser.

Question de droit : Au risque de me répéter, il est fondamental d’identifier correctement la question de droit qui est le sujet de l’arrêt. Si vous passez à côté, c’est tout votre commentaire qui sera très probablement hors-sujet. Donc prenez le temps de le faire correctement.

Répétitions : Le fait d’utiliser plusieurs fois la même expression dans un texte, de façon proche. C’est laid dans un roman, c’est parfaitement normal dans un commentaire d’arrêt. Ne cherchez pas à les éviter en utilisant absolument des synonymes, parce qu’en droit nous avons un mot pour chaque concept, rarement plus. Le risque est donc de vouloir diversifier la forme et de faire une erreur de fonds.

Style : A moins que vous n’ayez, avant vos études de droit, reçu le prix Pulitzer ou le prix Goncourt (ou le prix Femme Actuelle, pour ceux qui ont des lectures plus légères), vous n’avez pas de talent ni littéraire, ni journalistique, ne cherchez donc pas à en adopter le style de rédaction. Le style juridique a ceci de particulier qu’il doit être direct, précis et technique, et doit servir avant tout le fonds de votre commentaire.

Par contre, il est tout à fait possible de s’inspirer des romans ou articles de presse pour la gestion de la ponctuation ou des tournures de phrase, dans la mesure ou vous prenez des auteurs qui sont connus pour avoir des styles assez direct et clair. Pensez Maupassant plutôt que Proust.

Timing : La gestion du temps est primordiale dans tous les examens. Si on parle d’un commentaire pour l’épreuve de spécialité (3h), je vous recommande : 15mn de lecture attentive de l’arrêt, 45mn de définition d’un plan détaillé (titres + idées importantes dans l’ordre), 10 minutes de rédaction d’introduction (car l’intro est très formatée, donc rapide), puis 25 minutes par partie, et enfin 10 minutes de relecture.

Dans le cas d’un commentaire lors de l’épreuve de réflexion juridique (Droit des obligations + procédure, 5h, répartie ici moitié-moitié), comptez : 10 minutes de lecture, 40 minutes pour faire votre plan détaillé, 10 minutes pour l’introduction, puis 20 minutes par partie et 10 minutes de relecture.

Les parties de « réflexion » (lecture et création du plan) ne doivent pas être compressées : utilisez ce temps au maximum, car il ne peut être que bénéfique. Si vous terminez les étapes un peu plus vite que prévu, utilisez ce temps pour la relecture. Mais une fois que vous vous êtes relu, n’hésitez pas à partir de la salle, vous n’allez rien rajouter entre les lignes de toute manière.

Unique : Un commentaire d’arrêt doit être unique, dans le sens qu’il ne doit pas être interchangeable, ni dans ses développements évidemment, mais non plus dans ses titres ou son organisation générale, avec n’importe quel autre commentaire qui porterait sur un sujet voisin. Vous pouvez utiliser le plan-type que je vous ai donné, car il peut s’adapter à presque tous les arrêts. Mais c’est bien de l’adaptation, et non du décalquage. Le risque est que votre commentaire paraisse totalement insipide, et donc pas intéressant, ce qui vous fera une note, certes pas catastrophique, mais décevante.

Vide juridique : Encore pire que l’insécurité juridique (voir au-dessus), puisqu’ici j’ai de vrais arguments pour vous décourager d’utiliser cette expression. Le vide juridique n’existe pas en droit français, puisque tout juge saisi d’une question de droit dans le cadre de sa compétence devra la trancher. Il n’y a, à la limite, que des questions de droit dont l’issue n’est pas certaine parce qu’aucun juge n’a encore tranché exactement la même question. Mais ça ne veut pas dire qu’il y a un vide juridique ! Au contraire, une grande partie du travail des juristes et avocats est bel et bien de faire un travail de réflexion sur la solution que pourrait rendre un juge, éventuellement en estimant les probabilités de chacune des options. Mais il n’y a pas de questions qui ne puissent avoir une réponse en droit.

Invoquer le vide juridique est donc une faiblesse d’esprit que je vous déconseille fortement d’employer, parce que la plupart du temps il s’agit soit d’un manque d’esprit prospectif, soit d’une timidité à l’idée de porter une solution qui n’est pas encore passée dans le droit positif.

Wing it! : Équivalent en anglais de l'expression "Y aller au talent". Ce n'est évidemment absolument pas recommandé, mais il est tout à fait possible que malgré vos révisions, vous tombiez sur un sujet que vous ne connaissez absolument pas. Il ne faut absolument pas que ça influence votre méthode ! Si l'épreuve peut être résumée à 50% de connaissances pures, et 50% de méthode et d'application, vous avez encore de quoi vous battre pour récupérer des points. Donc si vous vous retrouvez malheureusement à devoir faire votre épreuve au talent, prenez ça comme un challenge, sinon vous allez vous pourrir tout seul.

X : (croix) Détail purement pratico-pratique, au cours de la rédaction final de votre commentaire, je vous conseille de barrer chaque élément de votre brouillon une fois que vous l’avez mis sur votre copie finale. Cela vous permettra de voir votre avancée et de confirmer que vous avez bien évoqué chaque point de votre brouillon.

Y voir clair dans les termes techniques : (oui je sais ce n’est pas terrible, mais des mots qui commencent en Y j’en connais pas tellement) Votre commentaire va souvent s'articuler autour de 3/4 notions clefs, qui seront souvent évoqués dans l'arrêt. Faites bien attention à les identifier correctement dès le début, à bien voir leurs différentes qualifications, et à ne pas en changer au milieu de votre commentaire. Ça vous évitera aussi de partir en hors-sujet, si vous maîtrisez bien le sujet de l'arrêt, ce qui passe par comprendre les termes utilisés.

Zone de vérité : En rugby, les 22 derniers mètres du terrain, où pour avancer il n’est pas possible de tricher ou de faire semblant. En commentaire, le moment où vous allez passer de la décision rendu à votre plan de commentaire. Tout la méthode du monde (la meilleure, si vous avez lu mes articles) ne remplacera pas une solide connaissance du droit et une véritable capacité de réflexion. C’est à ce moment-là que se révélera votre niveau « véritable », et vous devez l’avoir en tête pour ne pas vous disperser.


Je pense avoir fait le tour de ce qu'il y a à savoir sur le commentaire d'arrêt, au moins sur la forme et la méthode, le fonds c'est à vous de le bosser !

On va pouvoir maintenant passer à des choses plus spécifiques à l'examen d'entrée au CRFPA : la note de synthèse ! (Pas que, mais c'est un gros morceau).

Alexandre
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